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Page:Rouquette - Le Grand Silence Blanc, 1920.djvu/32

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LE GRAND SILENCE BLANC



Nous partons de Juneau au matin, après avoir fait escale pendant la nuit.

Nous franchissons le chenal Gastineau. La capitale de l’Alaska s’enfonce dans la brume, où le Capitole, adossé à la montagne, fait une tache laiteuse.

Une voix prononce près de moi :

— Vous n’êtes pas descendu à terre, docteur ?

C’est le capitaine qui me salue de cette appellation. Je suis monté en grade depuis hier.

— Non, capitaine.

— Vous avez ma foi raison. Pour retrouver des usines, des autos et des cinémas, ce n’est pas la peine de venir jusqu’ici : autant vaut rester à Seattle ou à Vancouver.

Le capitaine tire deux ou trois bouffées de sa courte pipe de terre, reste un instant accoudé près de moi, puis il s’en va de cette démarche spéciale, à la fois lourde et souple, des marins.

À trois pas, il se retourne et dit :

— À propos, savez-vous, l’homme est mort cette nuit.