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Page:Rouquette - Le Grand Silence Blanc, 1920.djvu/87

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LE GRAND SILENCE BLANC



Et quand la saison est finie, lorsque les premières brumes d’automne enveloppent les hautes falaises de Saint-Georges et les cônes volcaniques de Saint-Paul, Messieurs Phoques, suivis de Mesdames Phoques et des Babies Phoquelets, se mettent en route vers les mers du Sud.

Des milliers de célibataires — les bachelors, comme disent les marins anglais — qui les années précédentes évoluaient libres dans la mer libre, ne reviendront pas ; ils ne pourchasseront plus le flétan et le saumon, ils ne joueront plus sur la crête des vagues en renâclant et soufflant, ils ne se laisseront plus porter, les griffes ouvertes, par les courants.

Hélas ! leurs dépouilles sèchent, depuis des semaines déjà, sur les claies des abattoirs ; leur peau, tondue au rasoir, débarrassée des poils raides et couchés, ne garde que la bourre brune qui, entre les mains du faiseur de Londres ou de Paris, deviendra pour les épaules de nos belles ladies de la « loutre marine ».

Pauvre bachelor dépouillé, ta chair, qui est loin d’être savoureuse, a fait les délices de quel-