safra, d’autres pêchent à la ligne la perche, la barbue et le patassa ; d’autres enfin, plus paresseux ou plus philosophes, se contentant du nécessaire et dédaignant le superflu, savourent, aux heures et aux jours de relâche, le délicieux far niente. Dans les beaux jours d’été ils s’étendent nonchalamment, à l’ombre des vastes chênes verts, respirant avec volupté la brise embaumée des pinières ; l’hiver, ils se retirent dans leurs cabanes, nourrissant le brasier de l’âtre de larges bûches de mélèze :
- ........Ligna super foco
- Largè reponens.
Tous sont heureux, excepté quelques esclaves rétifs qu’un
indomptable instinct semble entraîner au vol ; qui sont également
sourds aux conseils et aux menaces du maître, et
contre lesquels il faut nécessairement employer l’ultima ratio…
Êtres malheureux que le travail irrite et que le repos
fatigue, dès que la nuit les couvre de ses voiles, ils
vont, fantômes errans, comme poussés par un bras invisible,
cherchant partout à satisfaire un immense besoin de
rapacité. Ils ne respectent même pas l’humble arpent de
terre qu’un de leurs frères laborieux cultive de ses mains et
arrose de ses sueurs. En vain, d’universelles clameurs partent
du camp pour flétrir ces indignes spoliateurs ; en vain
quelque Nestor, à cheveux blancs, élève une voix éloquente
pour les rappeler au sentiment du devoir ! Ils l’écoutent,
impassibles, inébranlables, les bras croisés, la tête haute :
une invincible fatalité les maîtrise : voler est pour eux une
joie, une passion, une gloire !