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CHAPITRE IX

Tels étaient les principes et les idées politiques qu’allait porter à Versailles le député du Tiers-État de Provence ; mais ce qu’on allait y voir paraître avec lui, c’était une puissance nouvelle dont rien, dans le passé, ne pouvait donner à la France le pressentiment ni le souvenir : la Puissance de la Parole.

Les grands sermonnaires du siècle de Louis XIV, défendant devant les puissants de ce monde la cause des petits et des opprimés, avaient ébranlé de leur éloquence des consciences royales et des multitudes choisies ; mais ce n’étaient pas eux qui parlaient ; c’était un Dieu qui, dans ce temps-là, n’avait pas d’athées,… c’était la parole sacrée s’excitant elle-même, s’échauffant au foyer solitaire de la méditation et de la foi ; écoutée en silence, sans contradiction et sans réplique ; soutenue par les pieuses croyances ou l’admiration mondaine d’une assistance accoutumée de longue main au respect.