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MIRABEAU.

gesses besogneuses de ce riche malaisé, des indolences de ce hobereau mal appris « qui avait la main plus légère encore à frapper qu’à donner »,. qui recevait les protêts la menace à la bouche et chassait les huissiers à coups de bâton.

En quinze mois, il s’était endetté de 200 000 livres. Il était en comptes réglés avec tous les usuriers de la province ; et il allait être arrêté à la requête de ses fournisseurs ameutés, lorsqu’un expédient commode vint le soustraire à leurs poursuites.

D’accord avec sa famille, et au grand contentement du coupable, le marquis de Mirabeau obtint du Ministère une lettre d’exil qui mettait son fils sous la main du Roy, c’est-à-dire à l’abri des mandements de justice. C’était un grave abus, mais dont les créanciers de Mirabeau pouvaient seuls se plaindre, et dont il triomphait, quant à lui, sans vergogne. « J’étais exilé et je m’applaudissais de l’être », a-t-il écrit plus tard en rappelant cette bonne fortune.

Deux mois après, sa sécurité était plus complète encore. Le 8 juin 1774, une sentence du Châtelet de Paris prononçait son interdiction. Il a souvent protesté contre cette déchéance, mais jamais il n’a rien tenté pour s’en affranchir ; et, jusqu’au dernier jour de sa vie, grâce à cette humiliante immunité, le grand insolvable a pu délier les poursuites de ses créanciers.

À quelque temps de là, il allait avoir sur les bras de bien autres affaires.