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MIRABEAU.

avouable industrie. C’était l’époque où le marquis et la marquise de Mirabeau s’étaient ouvertement déclaré la guerre. La marquise avait formé sa demande en séparation de corps, et l’on plaidait devant le parlement de Paris. Pour contenter ses propres rancunes et en tirer un parti convenable, Mirabeau, par l’entremise de Mme de Cabris, devint l’allié de sa mère et mit sa plume à son service. D’Amsterdam, il envoyait en France et en Angleterre les écrits les plus injurieux contre l’« Ami des hommes, qui n’était celui ni de sa femme, ni de ses enfants ». C’étaient tantôt une « anecdote à ajouter au nombreux recueil des hypocrisies philosophiques », tantôt des mémoires en règle et un « précis » juridique où il accumulait les griefs contre « le plus mauvais des maris, le plus dur et le plus dissipateur des pères », s’excusant seulement auprès de sa cliente de n’en pas dire assez. « J’aurais pu faire mieux si j’avais eu plus de temps ; mais il y a de la chaleur, et j’espère que vous ne serez pas mécontente. »

Mirabeau commençait ainsi cette odieuse campagne où, passant effrontément d’un camp dans l’autre, changeant, suivant le profit, de client et de dossier, il allait servir et trahir tour à tour les deux parties dont il ne pouvait être ni le défenseur, ni le témoin, ni le juge.