gistres, faites de province à province, on pourrait tellement régler le prix des denrées et la mesure des traites, que chaque piève ferait la consommation de son superflu et l’acquisition de son nécessaire, sans qu’il y eut ni défaut ni excédant dans la quantité, et presque aussi commodément que si la récolte se mesurait sur ses besoins.
Ces opérations peuvent se faire avec la plus grande justesse et sans monnaie réelle, mais par la voie d’échanges, ou à l’aide d’une simple monnaie idéale qui servirait de terme de comparaison, telle, par exemple, que sont les pistoles en France, soit en prenant pour monnaie quelque bien réel qui se nombre, comme était le bœuf chez les Grecs et la brebis chez les Romains, et qu’on fixe dans sa valeur moyenne ; car alors un bœuf peut valoir plus ou moins d’un bœuf, et une brebis plus ou moins d’une brebis, différence qui rend la monnaie idéale préférable, parce qu’elle est toujours exacte, n’étant prise que pour nombre abstrait.
Tant qu’on s’en tiendra là, les traites se maintiendront en équilibre, et les échanges, se réglant uniquement sur l’abondance ou la rareté relative des denrées, et sur la plus ou moins grande facilité des transports, resteront toujours et partout en rapports compensés ; et toutes les productions de l’île, également dispersées, y prendraient d’elles-même le niveau de la population. J’ajoute que l’administration publique pourra sans inconvénients présider à ces traites, à ces échanges, en tenir la balance, en régler toute la mesure, en faire la distribution, parce que, tant qu’ils se feront en nature, les officiers publics n’en pourront abuser et n’en auront pas même la tentation. Au lieu que la conversion des denrées en argent ouvre la porte à toutes