Page:Rousseau - Œuvres et correspondance inédites éd. Streckeisen-Moultou.djvu/40

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qui faisaient la guerre à celles de l’île. Dans la disette de renseignements historiques sur ce qui se passait, à cette époque, dans une lie que plusieurs puissances[1] convoitaient, nous allons emprunter les observations d’un personnage qui a fourni plus de matériaux à l’histoire qu’il n’en a mis en œuvre, et qui devait connaître celle d’un pays que sa naissance avait illustré : c’est Napoléon[2].

« En 1764, six bataillons français prirent la garde des villes maritimes, et sous leur égide ces places continuèrent à reconnaître l’autorité du Sénat. Ces garnisons françaises restèrent neutres et ne prirent aucune part à la guerre qui continua entre les Corses et les Génois. Les officiers français manifestèrent hautement les sentiments les plus favorables aux insulaires, et les plus contraires aux oligarques, ce qui acheva de leur aliéner tous les habitants des villes. En 1768, les troupes devaient retourner en France ; ce moment était attendu avec impatience ; il ne fût plus resté aucun vestige de l’autorité de Gênes dans l’île, lorsque le duc de Choiseul conçut la pensée de réunir la Corse à la France. Cette acquisition lui parut importante, comme une dépendance naturelle de la Provence, comme propre à protéger le commerce du Levant et à favoriser des opérations futures en Italie. Après de longues hésitations, le Sénat consentit, et Spinola, son ambassadeur à Paris, signa un traité par lequel les deux puissances convinrent que le roi de France soumettrait et désarmerait les Corses, et les

  1. Gênes, parce qu’elle l’avait possédée ; la France, pour qu’elle ne le fût point par l’Angleterre, et celle-ci, parce qu’elle lui consentit plus qu’à toute autre pour dominer dans la Méditerranée.
  2. Mémoires écrits à Sainte-Hélène, par le général Montholon. Tome IV, page 40.