Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t1.djvu/542

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commander, ils étoient forcés de l’aller chercher au loin ! Comment n’ont-ils pas senti, comment n’ont-ils pas vu que c’étoit tout le contraire ? Ouvrez les annales de votre nation, vous ne la verrez jamais illustre & triomphante que sous des Rois Polonais ; vous la verrez presque toujours opprimée & avilie sous les étrangers. Que l’expérience vienne enfin à l’appui de la raison ; voyez quels maux vous vous faites & quels biens vous vous ôtez.

Car, je le demande encore, comment la nation Polonaise ayant tant fait que de rendre sa Couronne élective, n’a-t-elle point songé à tirer parti de cette loi pour jetter parmi les membres de l’administration, une émulation de zele & de gloire, qui seule eût plus fait pour le bien de la patrie que toutes les autres loix ensemble ? Quel ressort puissant sur des ames grandes & ambitieuses que cette Couronne destinée au plus digne & mise en perspective devant les yeux de tout citoyen qui saura mériter l’estime publique ! Que de vertus, que de nobles efforts l’espoir d’en acquérir le plus haut prix ne doit-il pas exciter dans la nation, quel ferment de patriotisme dans tous les cœurs, quand on sauroit bien que ce n’est que par-là qu’on peut obtenir cette place devenue l’objet secret des vœux de tous les particuliers, si-tôt qu’à force de mérite & de services il dépendra d’eux de s’en approcher toujours davantage, & si la fortune les seconde, d’y parvenir enfin tout-à-fait ! Cherchons le meilleur moyen de mettre en jeu ce grand ressort si puissant dans la République, & si négligé jusqu’ici. L’on me dira qu’il ne suffit pas de ne donner la Couronne qu’à des Polonois, pour lever les difficultés dont