Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t12.djvu/319

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grands cailloux & quartiers de roche qui paroissent avoir été entraînés là par les eaux. Cette grotte-ci n’étant pas si praticable que l’autre n’a pas de même tenté les curieux. Le jour que j’en examinai l’ouverture, il faisoit une chaleur insupportable ; cependant il en sortoit un vent si vif & si froid que je n’osai rester long-tems à l’entrée, & toutes les fois que j’y suis retourné j’ai toujours senti le même vent ; ce qui me fait juger qu’elle a une communication plus immédiate & moins embarrassée que l’autre.

À l’ouest de la vallée une montagne la sépare en deux branches, l’une fort étroite où sont le village de St. Sulpice, la source de la Reuse, & le chemin de Pontarlier. Sur ce chemin l’on voit encore une gros chaîne scellée dans le rocher & mise là jadis, par les Suisses pour fermer de ce côté-là le passage aux Bourguignons.

L’autre branche plus large & à gauche de la premiere, menu par le village de Butte à un pays perdu appelle la côte-aux-Fées, qu’on apperçoit de loin parce qu’il va en montant. Ce pays n’étant sur aucun chemin passe pour très-sauvage & en quelque sorte pour le bout du monde. Aussi prétend-on que c’étoit autrefois le séjour des Fées, & le nom lui en est resté. On y voit encore leur fille d’assemblée dans une troisieme caverne qui porte aussi leur nom, & qui n’est pas moins curieuse que les précédentes. Je n’ai pas vu cette grotte-aux-Fées, parce qu’elle est assez loin d’ici ; mais on dit qu’elle étoit superbement ornée, & l’on y voyoit encore il n’y a pas long-tems, un trône & des siéges très-bien taillés dans le roc. Tout cela a été gâté & ne paroît presque plus aujourd’hui. D’ailleurs