Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/304

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

M. ROUSSEAU À M. CLAIRAUT.

De Motiers-Travers, le 3 Mars 1765.

“Le souvenir, Monsieur, de vos anciennes bontés pour moi, vous cause une nouvelle importunité de ma part. Ils’agiroit de vouloir bien être, pour la seconde fois, censeur d’un de mes ouvrages. C’est une très-mauvaise rapsodie que j’ai compilée il y a plusieurs années, sous le nom de Dictionnaire de Musique, & que je suis forcé de donner aujourd’hui pour avoir du pain. Dans le torrent des malheurs qui m’entraîne, je suis hors d’état de revoir ce recueil. Je sais qu’il est plein d’erreurs & de bévues. Si quelqu’intérêt pour le sort du plus malheureux des hommes vous portoit à voir son ouvrage avec un peu plus d’attention que celui d’un autre, je vous serois sensiblement obligé de toutes les fautes que vous voudriez bien corriger chemin faisant. Le indiquer sans les corriger ne seroit, rien faire car je suis absolument hors d’état d’y donner la moindre attention & si vous daignez en user comme de votre bien, pour changer, ajouter, ou retrancher, vous exercerez une charité très-utile & dont je serai très-reconnoissant. Recevez Monsieur, mes très -humbles excuses & mes salutations.”

J. J. R.

Je le dis avec regret, mais je suis forcé de le dire : je sais aujourd’hui avec certitude que cette affectation de misere & de pauvreté extrême, n’est qu’une petite charlatanerie que M. Rousseau emploie avec succès pour se rendre plus intéressant