Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/308

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on satisfaisoit toutes ses fantaisies ; on n’épargna enfin ni tems ni complaisance pour lui procurer ce qu’il desiroit ; &, quoique plusieurs des projets que j’avois formés pour son établissement eussent été rejettes, je me trouvois assez récompensé de mes peines par la reconnoissance & la tendresse même dont il paroissoit recevoir mon zele & mes bons offices.

Enfin on lui proposa l’arrangement auquel il est aujourd’hui fixé. M. Davenport, gentilhomme : distingué par sa naissance, sa fortune & son mérite, lui a offert une maison, appellée Wootton, qu’il a dans le Comté de Derby, & qu’il habite rarement ; & M. Rousseau lui paye pour lui & pour sa gouvernante une modique pension.

Dès que M. Rousseau fut arrivé à Wootton, il m’écrivit la lettre,suivante.

M. ROUSSEAU À M. HUME.

À Wootton ; le 22 mars 1766.

“Vous voyez déjà, mon cher Patron, par la date de ma lettre, que je suis arrivé au lieu de ma destination. Mais vous ne pouvez voir tous les charmes que j’y trouve ; il faudroit connoître le lieu & lire dans mon cœur. Vous y devez lire au moins les sentimens qui vous regardent & que vous avez si bien mérités. Si je vis dans cet agréable asyle aussi heureux que, je l’espere, une des douceurs de ma vie sera de penser que je vous les dois. Faire un homme heureux c’est mériter de l’être. Puissiez-vous trouver en vous-même le prix de tout ce que vous avez fait pour moi ! Seul,