Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t14.djvu/443

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plus simulée que les précédentes ; l’Auteur en y peignant l’étroite situation où il se trouvoit, de faire ressource de son Dictionnaire de Musique pour avoir du pain, paroissoit bien moins faire cet aveu pour exciter la commisération dit public que pour engager un savant charitable à se charger de la correction & de la vente de son ouvrage.

L’interprétation que M. Hume donne à cette démarche n’est point à son éloge : elle ne fait pas voir le philosophe, ni même l’homme sensé : elle montre une ame vile, un esprit dur, & tout ce que la vengeance peut graver de plus noir dans le cœur humain.

Quand un homme ne doit ses disgraces qu’à des infortunes & non pas à sa mauvaise conduite, pourquoi rougiroit-il de sa misere, qui n’est que l’ouvrage des coups du sort, pour ne pas dire des injustices des hommes ? Pourquoi, avec la preuve de sa vigilance en main, se seroit-il scrupule de recourir avec décence aux ames nobles & aux cœurs bienfaisans, qui sont les instrumens dont la providence se sert pour aider nos ames vertueuses, mais plus particulièrement aux hommes laborieux ?

Rousseau qui se contredit assez souvent dans ses ouvrages, comme dans ses sentimens, avoir oublié qu’après avoir refuse les libéralités de plusieurs personnes distinguées par leurs dignités ou par leur fortune, il ne lui convenoit plus, en demandant un service à M. Clairaut, de terminer sa lettre, en lui disant qu’il exerceroit une charité très-utile. Cette maniere de s’exprimer convient assez à un mendiant du bas étage, & jamais à un homme qui sait manier à son gré la parole, & qui peut être le maître des expressions, dont il se sert, sachant