Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/106

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allée du parc qui bordoit le Cher ; & tout cela se fit sans discontinuer mon travail sur la chimie & celui que je faisois auprès de Mde. D[...]n.

Tandis que j’engraissois à Chenonceaux, ma pauvre Thérèse engraissoit à Paris d’une autre manière, & quand j’y revins, je trouvai l’ouvrage que j’avois mis sur le métier plus avancé que je ne l’avois cru. Cela m’eût jeté, vu ma situation, dans un embarras extrême, si des camarades de table ne m’eussent fourni la seule ressource qui pouvoit m’en tirer. C’est un de ces récits essentiels que je ne puis faire avec trop de simplicité, parce qu’il faudroit, en les commentant, m’excuser ou me charger, & que je ne dois faire ici ni l’un ni l’autre.

Durant le séjour d’Altuna à Paris, au lieu d’aller manger chez un traiteur, nous mangions ordinairement lui & moi à notre voisinage, presque vis-à-vis le cul-de-sac de l’Opéra, chez une Mde. la Selle, femme d’un tailleur, qui donnoit assez mal à manger, mais dont la table ne laissoit pas d’être recherchée, à cause de la bonne & sûre compagnie qui s’y trouvoit ; car on n’y recevoit aucun inconnu & il falloit être introduit par quelqu’un de ceux qui y mangeoient d’ordinaire. Le commandeur de G

[ravill] e, vieux débauché, plein de politesse & d’esprit, mais ordurier, y logeoit & y attiroit une folle & brillante jeunesse en officiers aux gardes & mousquetaires. Le commandeur de N

[onan] t, chevalier de toutes les filles de l’Opéra, y apportoit journellement toutes les nouvelles de ce tripot. MM. Duplessis lieutenant-colonel