Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/23

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transposition ne valoit rien. Ils partirent de-là pour tourner en invincible objection, contre mon système, son avantage le plus marqué ; & ils décidèrent que ma note étoit bonne pour la vocale & mauvaise pour l’instrumentale. Sur leur rapport, l’Académie m’accorda un certificat plein de très beaux compliments, à travers lesquels on démêloit, pour le fond, qu’elle ne jugeoit mon système ni neuf ni utile. Je ne crus pas devoir orner d’une pareille pièce l’ouvrage intitulé : Dissertation sur la musique moderne, par lequel j’en appelois au public.

J’eus lieu de remarquer en cette occasion combien, même avec un esprit borné, la connoissance unique, mais profonde, de la chose est préférable, pour en bien juger, à toutes les lumières que donne la culture des sciences, lorsqu’on n’y a pas joint l’étude particulière de celle dont il s’agit. La seule objection solide qu’il y eût à faire à mon système y fut faite par Rameau. À peine le lui eus-je expliqué, qu’il en vit le côté foible. Vos signes, me dit-il, sont très bons en ce qu’ils déterminent simplement & clairement les valeurs, en ce qu’ils représentent nettement les intervalles & montrent toujours le simple dans le redoublé, toutes choses que ne foit pas la note ordinaire ; mais ils sont mauvais en ce qu’ils exigent une opération de l’esprit qui ne peut toujours suivre la rapidité de l’exécution. La position de nos notes, continua-t-il, se peint à l’œil sans le concours de cette opération. Si deux notes, l’une très haute, l’autre très basse, sont jointes par une tirade de notes intermédiaires,