Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t16.djvu/60

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il se servit de lui pour écrire à M. de Maurepas une relation de l’affaire du capitaine Oliv & dans laquelle, loin de lui faire aucune mention de moi qui seul m’en étois mêlé, il m’ôtoit même l’honneur du verbal, dont il lui envoyoit un double, pour l’attribuer à Patizel, qui n’avoit pas dit un seul mot. Il vouloit me mortifier & complaire à son favori, mais non pas se défaire de moi. Il sentoit qu’il ne lui seroit plus aussi aisé de me trouver un successeur qu’à M. Follau, qui l’avoit déjà foit connaître. Il lui falloit absolument un secrétaire qui sût l’italien, à cause des réponses du sénat ; qui fit toutes ses dépêches, toutes ses affaires sans qu’il se mêlât de rien ; qui joignît au mérite de bien servir la bassesse d’être le complaisant de messieurs ses faquins de gentilshommes. Il vouloit donc me garder & me mater en me tenant loin de mon pays & du sien, sans argent pour y retourner ; & il auroit réussi peut-être, s’il s’y fût pris modérément. Mais Vitali, qui avoit d’autres vues & qui vouloit me forcer de prendre mon parti, en vint à bout. Dès que je vis que je perdois toutes mes peines, que l’Ambassadeur me faisoit des crimes de mes services au lieu de m’en savoir gré, que je n’avois plus à espérer chez lui que désagrémens au dedans, injustice au dehors & que, dans le décri général où il s’étoit mis, ses mauvais offices pouvoient me nuire sans que les bons pussent me servir, je pris mon parti & lui demandai mon congé, lui laissant le tems de se pourvoir d’un secrétaire. Sans me dire ni oui ni non, il alla toujours son train. Voyant que rien n’alloit mieux & qu’il ne se mettoit en devoir de chercher personne, j’écrivis à son frère & lui