Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t6.djvu/176

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Cependant, parce qu’un d’entre eux, compilant force plaisanteries scolastiques, aussi bénignes qu’élégantes, pour juger mon Christianisme, ne craint pas d’abjurer le sien ; tout charmés du savoir de leur Confrere, & sur-tout de sa logique, ils avouent son docte ouvrage & l’en remercient par une députation. Ce sont en vérité de singulieres gens que Messieurs vos Ministres ; on ne soit ni ce qu’ils croient ni ce qu’ils ne croient pas ; on ne soit pas même ce qu’ils font semblant de croire : leur seule maniere d’établir leur foi est d’attaquer celle des autres : ils font comme les Jésuites, qui, dit-on, forçoient tout le monde à signer la Constitution, sans vouloir la signer eux-mêmes. Au lieu de s’expliquer sur la doctrine qu’on leur impute, ils pensent donner le change aux autres Eglises, en cherchant querelle à leur propre défenseur ; ils veulent prouver par leur ingratitude qu’ils n’avoient pas besoin de mes soins, & croient se montrer assez orthodoxes en se montrant persécuteurs.

De tout ceci je conclus qu’il n’est pas aisé de dire en quoi consiste à Geneve aujourd’hui la sainte Réformation. Tout ce qu’on petit avancer de certain sur cet article, est qu’elle doit consister principalement à rejetter les points contestés à l’Eglise Romaine par les premiers Réformateurs, & sur-tout par Calvin. C’est-là l’esprit de votre institution ; c’est par-là que vous êtes un Peuple libre, & c’est par ce côté seul que la Religion fait chez vous partie de la Loi de l’Etat.

De cette premiere question je passe à la seconde, & je