Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/49

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précepte à ses disciples & à nos neveux, que l’exemple & la mémoire de sa vertu. C’est ainsi qu’il est beau d’instruire les hommes.

Socrate avoit commencé dans Athènes, le vieux Caton continua dans Rome, de se déchaîner contre ces Grecs artificieux & subtils qui séduisoient la vertu et amollissoient le courage de ses concitoyens. Mais les Sciences, les Arts & la dialectique prévalurent encore : Rome se remplit de Philosophes & d’Orateurs ; on négligea la discipline militaire, on méprisa l’agriculture, on embrassa des sectes, et l’on oublia la Patrie. Aux noms sacrés de liberté, de désintéressement, d’obéissance aux lois, succédèrent les noms d’Epicure, de Zénon, d’Arcésilas. Depuis que les Savans ont commencé à paroître parmi nous, disoient leurs propres Philosophes, les Gens de bien se sont éclipsés. Jusqu’alors les Romains s’étoient contentés de pratiquer la vertu ; tout fut perdu quand ils commencèrent à l’étudier.

O Fabricius ! qu’eût pensé votre grande ame, si pour votre malheur rappelé à la vie, vous eussiez vu la face pompeuse de cette Rome sauvée par votre bras & que votre nom respectable avoit plus illustrée que toutes ses conquêtes ? "Dieux ! eussiez-vous dit, que sont devenus ces toits de chaume & ces foyers rustiques qu’habitoient jadis la modération & la vertu ? Quelle splendeur funeste a succédé à la simplicité Romaine ? Quel est ce langage étranger ? Quelles sont ces mœurs efféminées ? Que signifient ces statues, ces tableaux, ces édifices ? Insensés ! qu’avez-vous fait ? Vous les Maîtres des Nations, vous vous êtes rendus les esclaves des hommes frivoles que vous avez vaincus ! Ce sont des Rhéteurs