Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/97

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Mon discours, dit-on, a de quoi surprendre ;*

[*C’est de la question même qu’on pourroit être surpris : grande & belle question s’il en fut jamais, & qui pourra bien n’être pas si-tôt renouvelée. L’Académie Françoise vient de proposer pour le prix d’éloquence de l’année 1752, un sujet fort semblable à celui-là. Il s’agit de soutenir que l’Amour des Lettres inspire l’amour de la la vertu. L’Académie n’a pas juge à de laisser un tel sujet en problème ; & cette sage Compagnie a double dans cette occasion le tems qu’elle accordoit ci-devant aux Auteurs, même pour les sujets les plus difficiles.] il me semble que ceci demanderoit quelque éclaircissement. On est encore surpris de le voir couronne ; ce n’est pourtant pas un prodige de voir couronner de médiocres ecrits. Dans tout autre sens cette surprise seroit aussi honorable à l’Académie de Dijon, qu’injurieuse à l’intégrité des Académies en général ; & il est aise de sentir combien j’en serois le profit de ma cause.

On me taxe par des phrases fort agréablement arrangées de contradiction entre ma conduite & ma doctrine ; on me reproche d’avoir cultive moi-même les études que je condamne ;*

[* Je ne saurois me justifier, comme bien d’autres, sur ce que notre éducation ne dépend point de nous, & qu’on ne nous consulte pas pour nous empoisonner : c’est de très-bon gré que je me suis jette dans l’étude ; & c’est de meilleur cœur encore que je l’ai abandonnée, en m’appercevant du trouble qu’elle jettoit dans mon ame sans aucun profit pour ma raison. Je ne veux plus d’un métier trompeur, ou l’on croit beaucoup faire pour la sagesse, en faisant tout pour la vanité.] puisque la Science & la Vertu sont incompatibles,