Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t1.djvu/52

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même plus de philosophie qu’on ne pense à celui qui entreprendroit de déterminer exactement les précautions à prendre, pour faire sur ce sujet de solides observations ; & une bonne solution du problême suivant ne me paroîtroit pas indigne des Aristotes & des Plines de notre siecle : Quelles expériences seroient nécessaires pour parvenir à connoître l’homme naturel ; & quels sont les moyens de faire ces expériences au sein de la société ? Loin d’entreprendre de résoudre ce problême, je crois en avoir assez médité le sujet pour oser répondre d’avance que les plus grands Philosophes ne seront pas trop bons pour diriger ces expériences, ni les plus puissans Souverains pour les faire ; concours auquel il n’est gueres raisonnable de s’attendre, sur-tout avec la persévérance ou plutôt la succession de lumieres & de bonne volonté, nécessaire de part & d’autre pour arriver au succes.

Ces recherches si difficiles à faire, & auxquelles on a si peu songé jusqu’ ici, sont pourtant les seuls moyens qui nous restent de lever une multitude de difficultés qui nous dérobent la connoissance des fondemens réels de la société humaine. C’est cette ignorance de la nature de l’homme qui jette tant d’incertitude & d’obscurité sur la véritable définition du droit naturel : car l’idée du droit, dit M. Burlamaqui, & plus encore celle du droit naturel, sont manifestement des idées relatives à la