Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/303

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mais il nous commande comme à ſes ſujets & nous dédaigne comme ceux d’un autre. Ses richeſſes ſeules ſuffisent pour ce donatif qu’on vous vante ſans ceſſe & qu’on ne vous donne jamais.

” Afin de ne pas même laiſſer d’eſpoir à ſon succeſſeur, Galba a rappellé d’exil un homme qu’il jugeoit avare & dur comme lui. Les Dieux vous ont avertis par les plus ſignes les plus évidens qu’ils déſapprouvoient cette élection : le Sénat le Peuple & le Romain ne lui ſont pas plus favorables ; mais leur confiance eſt toute en votre courage ; car vous avez la force en main pour exécuter les choſes honnêtes, & ſans vous les meilleurs deſſeins ne peuvent avoir d’effet. Ne croyez pas qu’il ſoit ici queſtion de guerres ni de périls, puiſque toutes les troupes ſont pour nous, que Galba n’a qu’une cohorte en toge, dont il n’eſt pas le chef, mais le priſonnier, & dont le ſeul combat à votre aspect & à mon premier ſigne va être à qui m’aura le plutôt reconnu. Enfin ce n’eſt pas le cas de temporiſer dans une entrepriſe qu’on ne peut louer qu’après l’exécution.”

Auſſi-tôt ayant fait ouvrir l’Arsenal, tous coururent aux armes ſans ordre, sans regle, ſans diſtinction des Enſeignes prétoriennes & des Légionnaires, de l’écu des Auxiliaires & du bouclier Romain. Et ſans que ni Tribun ni Centurion s’en mêlât, chaque ſoldat devenu ſon propre officier s’animoit & s’excitoit lui-même à mal faire par le plaiſir d’affliger les gens de bien.