Page:Rousseau - Collection complète des œuvres t7.djvu/427

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les voyant, s’écria ; bon, je trouve par-tout des amis : par quel hazard êtes-vous ici ?

Comment, ſcélérat, dit Pedo Pompeïus, par quel hazard ? Et qui nous y envoya que toi même, bourreau de tous tes amis ? Viens, viens devant le Juge ; ici je t’en montrerai le chemin. Il le mene au tribunal d’Eaque, lequel précisément ſe faiſoit rendre compte de la loi Cornelia ſur les meurtriers. Pedo fait inſcrire ſon homme & préſente une liſte de trente Sénateurs, trois cents quinze Chevaliers Romains, deux cents vingt-un Citoyens & d’autres en nombre infini, tous tués par ſes ordres.

Claude effrayé tournoit les yeux de tous côtés pour chercher un défenſeur, mais aucun ne ſe préſentoit. Enfin, P. Petronius ſon ancien convive & beau parleur comme lui, requit vainement d’être admis à le défendre. Pedo l’accuſe à grands cris, Pétrone tâche de répondre ; mais le juſte Eaque le fait taire, & après avoir entendu ſeulement l’une des parties, condamne l’accuſé, en diſant :

Il est traité comme il traita les autres.

A ces mots il ſe fit un grand ſilence : Tout le monde étonné de cette étrange forme la ſoutenoit sans exemple ; mais Claude la trouva plus inique que nouvelle. On diſputa long-tems ſur la peine qui lui ſeroit impoſée. Quelques-uns diſoient qu’il faloit faire un échange, que Tantale mourroit de ſoif s’il