APPENDICE V. 3·;¤ Il est important de remarquer que cette régle de justice, sure par rapport a tous les citoyens, peut étre fautive avec les etrangers: et Ia raison de ceci est évidente; c’est qu’alors la volonté de I’Etat, quoique générale par rapport at ses membres, ne l’est plus par rapport aux autres Etats et a Ieurs membres, mais devient pour eux une volonté particuliére et individuelle, qui a sa régle de justice dans la Ioi de nature; ce qui rentre également dans le principe établi, car alors la grande ville du monde devient le corps politique ldont la loi de nature est toujours Ia volonté générale, et dont les Etats et peuples divers ne sont que des membres individuels. De ces mémes distinctions appliquées a chaque société politique et a ses membres, découlent les regles les plus universelles et les plus sures sur lesquelles on puisse juger d’un bon ou d’un mauvaisyyy vernement, et en général de la moralité de toutes les actions humainés, Toute société politique est composée d’autres sociétés plus petites de différentes especes, dont chacune a ses intéréts et ses maximes : mais ces sociétés, que chacun apergoit parce qu’elles ont une forme extérieure et autorisée, ne sont pas les seules qui existent réellement dans l’Etat; tous les particuliers qu’un intérét commun réunit en composent autant d’autres, permanentes ou passageres, dont la force n’est pas moins réelle pour étre moins apparente, et dont les divers rapports bien observés font la véritable connaissance des moaurs. Ce sont toutes ces associations tacites ou formelles qui modiiient de tant de maniéres les apparences de la volonté publique par Pinfiuence de la leur. La volonté de ces sociétés particulieres a toujours deux rela- tions : pour les membres de l’association, c’est une volonté générale; pourla grande société, c’e st une volonté particuliére, qui tres souvent se trouve droite au premier égard, et vicieuse au second. Tel peut étre prétre dévot, ou brave soldat, ou patricien zélé, et mauvais citoyen. Telle délibération peut étre avantageuse a la petite commu- nauté et tres pernicieuse a la grande. Il est vrai que, les sociétés par- ticuliéres étant touiours subordonnées at celles qui les contiennent, on doit obéir a celles-ci préférablement aux autres; que les devoirs du citoyen vont avant ceux du sénateur, et ceux de l’homme avant ceux du citoyen : mais malheureusement Pintérét personnel se trouve toujours en raison inverse du devoir, et augmente a mesure que l’association devient plus étroite et Pengagement moins sacré; preuve invincible que la volonté la plus générale est aussi toujours la plus juste, et que la voix du peuple est en eH`et la voix de Dieu. Il ne s’ensuit pas pour cela que les délibérations publiques soient toujours équitables ; elles peuvent ne l’étre pas lorsqu’il s’agit d’ail'aires étrangeres; i’en ai dit la raison. Ainsi il n’est pas impos- sible qu’une république bien gouvernée fasse une guerre injuste, il ne _ 1’est pas non plus que le conseil d’une démocratie passe de mauvais décrets et condamne les innocents : mais cela n’arrivera jamais que
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