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JEAN-JACQUES ROUSSEAU

FRAGMENTS INÉDITS.




I   ROUSSEAU ET LES ROGUIN D’YVERDON


„J’oubliais de te dire, écrit Saint-Preux à Julie dans la Nouvelle Héloïse, que M. Roguin m’a offert une compagnie dans le régiment qu’il lève pour le roi de Sardaigne. J’ai été sensiblement touché de l’estime de ce brave officier ; je lui ai dit, en le remerciant, que j’avais la vue trop courte pour le service et que ma passion pour l’étude s’accordait mal avec une vie aussi active.“ [1]

Daniel Roguin, „le doyen des amis de Rousseau“, recevant de l’auteur un exemplaire de la Nouvelle Héloïse, lui fit observer qu’il avait immortalisé, dans cet ouvrage, le théâtre de l’action ainsi que toutes les personnes dont il parlait ; il se sentait flatté ajouta-t-il, que sa famille n’y fût pas oubliée. Il termina en remerciant Rousseau de l’excellente leçon que celui-ci avait donnée à sa famille et en déclarant que celle-ci l’avait méritée pour la justice rendue, par feu le colonel Roguin, au talent de Rousseau. [2]

Parmi les familles suisses qui se sont distinguées au service étranger, celle des Roguin d’Yverdon est une des plus illustres. Albert-Louis Roguin fut colonel au service du roi de Sardaigne qui lui accorda, le 13. novembre 1733, la levée d’un régiment suisse protestant ; il fit en 1734 la campagne contre les impériaux en qualité d’aide-de-camp du roi de Sardaigne, rendit des services importants à l’armée des alliés jusqu’à la fin de la guerre et mourut durant un séjour à Yverdon au mois de mars 1737.

  1. Oeuvres complèts de J. J. Rousseau. Paris, Librairie Hachette et Cie. 1872. Julie, ou la Nouvelle Héloïse. IV, p. 72.
  2. D. Roguin à M. J. J. Rousseau. Paris le 27 février 1761. Manuscrit de la Bibliothèque publique de Neuchâtel.