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La Monongahéla

moi ces tendresses que connaît seul le cœur d’une mère et qui lui font deviner les angoisses de son enfant ? Dois-je les maudire parce qu’ils ne peuvent pas comprendre que s’ils me forcent à épouser un autre homme que vous, Nicolas, ils consomment le malheur de ma vie ?

— Mais vous n’avez donc pas parlé ?

— Oui, mon ami, j’ai tout dit à madame de Vaudreuil.

— Mais alors…

— Elle a reçu ma confidence de meilleure grâce que je ne l’espérais.

— S’il en est ainsi, pourquoi, désespérer ?

— Hélas ! elle a écouté mes paroles avec douceur, et quand la confidence a été faite : — « Mon enfant, m’a-t-elle dit, c’était un mal et une grande imprudence de donner des espérances à ce jeune homme avant d’avoir pris conseil de ton oncle et de ta tante ; mais puisqu’il n’y a plus à y revenir, tâchons de tirer le meilleur parti possible d’une mauvaise position. Tu connais les projets de M. de Vaudreuil et tu sais qu’il revient rarement sur une décision prise. Cependant je te promets mon concours ; prie le ciel qu’il me donne l’éloquence nécessaire pour le convaincre. Ne te fais pas illusion pourtant, il y a de grandes difficultés à vaincre. »

— Voyons, reprit Nicolas, si je ne suis pas un