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La Monongahéla

fille le cœur serré, la poitrine prête à éclater en sanglots.

— Je possède celles que j’ai cueillies sur la tombe de ma mère bien-aimée !

La jeune fille respira, et d’une voix rassérénée, mais encore pleine de tristesse :

— Hélas ! dit-elle, je n’ai jamais connu ni mon père, ni ma mère !

— Pardon ! mademoiselle, si je viens de vous rappeler involontairement un cruel souvenir.

— Oh ! je donnerais ma vie pour embrasser ma mère.

— Votre tante vous aime beaucoup.

— Oh ! ma tante est parfaite pour moi ; mais ce ne sont pas les baisers d’une mère.

Le silence régna pendant quelques minutes entre les deux jeunes gens.

— Est-ce bien certain, comme vient de l’annoncer votre ami que vous partez cette nuit même ? reprit Irène.

— Oui, nous appareillons tout probablement cette nuit.

— Et vous reviendrez bientôt ?

— S’il plait à Dieu. La campagne s’ouvre sous de sombres couleurs et dans notre carrière, à cette époque surtout, nous avons toujours devant nous dix chances contre une de succomber.