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Les Exploits d’Iberville

— Oui, mon fils, j’ai dit à Yvonne l’amour pur, l’amour saint que tu ressentais pour elle et voici la réponse qu’elle m’a chargée de te remettre.

Le jeune homme devint plus pâle encore et hésita quelques instants ; puis d’une main fiévreuse, il rompit le cachet. Dès les premières lignes, il porta la main à son cœur d’un geste convulsif. Voici ce que lui écrivait la jeune fille :

« Lewis,

« Ne me maudissez pas, ne me jugez pas avant de m’avoir entendue ; quand ces lignes vous parviendront, j’aurai dit un éternel adieu au toit sous lequel j’ai passé les plus belles années de ma vie. Si j’agis de la sorte, si je pars sans vous voir une dernière fois, il faut donc que je sois guidée par des motifs bien graves, une bien dure nécessité !

« Mon ami, votre mère m’a appris l’honneur que vous me faisiez ; elle m’assure que vous ressentez pour moi un sentiment plus tendre que celui d’un frère pour sa sœur, vous, le plus noble des hommes, vous, un des plus grands cœurs que j’aie connus. Or, mon ami, je dois croire à la réalité de ces sentiments puisque c’est votre mère qui me l’affirme. Il me restait donc un grand devoir à remplir, au risque de tous les déchirements de mon être, et ce devoir, c’est celui de vous fuir. Vous allez me comprendre, écoutez-moi, mon ami :

« Depuis le jour où je vous ai connu, dans les terribles circonstances qui sont toujours présentes à