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Les Exploits d’Iberville

— J’abrège, commandant, ce trop long récit ! fit le jeune officier après un silence de quelques instants.

— Non, en vérité, mon cher Urbain, interrompit d’Iberville, ne me privez d’aucuns détails, je vous en prie ; ce récit m’intéresse plus que je ne saurais dire.

« Quand je repris connaissance, continua Urbain en parlant cette fois-ci à la première personne, j’étais couché dans notre masure sur mon grabat et ma pauvre mère me prodiguait ses soins en pleurant. Sans avoir de blessures graves, l’ébranlement nerveux me retint cependant quelques jours à la maison. Un bon matin, cette bonne mère m’ayant lavé, bouclé mes cheveux blonds, habillé le plus convenablement possible, je partis avec mon père et nous nous dirigeâmes vers le château.

« Voici, en peu de mots, ce qui me valait cette visite inattendue. »

« Rentré dans ses sombres appartements, le soir de l’accident, le marquis s’était plongé dans de profondes réflexions. Il se demanda si la Providence n’avait pas des vues secrètes en jetant ainsi sur son douloureux chemin cet enfant, si cette même Providence ne lui désignait pas ce petit être chétif et maltraité comme devant remplacer le fils qu’il avait perdu et qu’il pleurait encore ? C’est vous dire, mon commandant, que la pensée de m’adopter et de me faire l’héritier de sa fortune et de son nom se présentait déjà à son esprit.