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Les Exploits d’Iberville

qu’on aurait dit que j’étais venu au Monde au milieu de ces lambris dorés et que le sang patricien des Duperret-Janson coulait en réalité dans mes veines. Ainsi donc les prévisions et les espérances de mon bienfaiteur se réalisaient, et si ma présence au château ne lui apportait pas encore la joie, il constatait du moins que la vie commençait à renaître dans son cœur.

« Je vous ai dit, ou plutôt vous avez entendu de la bouche même du marquis ses projets à mon égard. Cependant M. Duperret-Janson ne voulait les réaliser que si je m’en montrais réellement digne. Or, il fallait avant tout former le cœur et l’esprit de cet enfant. On me mit donc sous les soins d’un précepteur d’une incontestable valeur, et sous son habile direction, à dix-sept ans accomplis, il annonçait à mon protecteur qu’il n’avait plus rien à m’apprendre. Le marquis s’était chargé de mon éducation de gentilhomme, c’est-à-dire les armes, les belles manières et la chasse.

« C’est à cette époque que je perdis, à quelques mois de distance, mon père et ma mère que j’aimais tendrement, ma sainte mère surtout. Je restai donc bien la véritable propriété de M. Duperret, puisque je ne me connaissais aucun parent au monde.

« Ma vie se passait, douce et tranquille, entre ce bon vieillard et mes livres. Le jour je l’accompagnais à la chasse, et le soir je faisais sa partie d’échecs. Vous l’avouerais-je ? Mon commandant, je ne me rap-