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Les Exploits d’Iberville

Une grande bâtisse en pierre jaune de trois étages occupait alors à New-York un large espace, à peu près à l’endroit où se trouve aujourd’hui la jetée No 42 de la rivière Nord. Tout à côté se voyaient les entrepôts d’une riche compagnie d’armateurs — John Randolph Clark & Co — chez laquelle le père Kernoüet était entré en qualité de factotum, grâce à la haute protection de Lewis Glen.

À quelques pas plus loin, s’étendait une longue file de tavernes plus ou moins bien achalandées, que fréquentaient les nombreux marins du porc. C’est dans une de ces tavernes que nous transporterons le lecteur quelques mois après le départ d’Yvonne d’Albany.

Deux hommes aussi proprement que pauvrement vêtus, sont attablés dans un coin d’une longue salle enfumée, tandis que des matelots bruyants entourent un comptoir recouvert en étain, derrière lequel trône une grosse maritorne dont les poings seraient de force à assommer un bœuf.

Les deux hommes, insensibles au tapage qui règne autour d’eux, sont absorbés dans une conversation qui attire toute leur attention.

— Ainsi, tu espères réussir ? dit un de ces deux hommes en portant à ses lèvres une chope de bière.

— Non sans difficultés, je vous l’assure, père Kernouët. Seulement…

— Seulement ?

— Il nous faut trouver encore cent livres.