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Les Exploits d’Iberville

quins. Ils firent la guerre à ce peuple avec une férocité proportionnée à leur ressentiment. »[1]

Enflés par des succès inouïs, ils s’appelèrent orgueilleusement Ongue-honwe, c’est-à-dire, hommes supérieurs aux autres hommes, et devinrent la terreur du nord de l’Amérique.

C’est dans de telles mains qu’étaient tombés le père Kernouët et sa fille.

Nous ne redirons pas les mauvais traitements, les fatigues, les souffrances de toutes sortes que les pauvres captifs eurent à endurer pendant qu’on les conduisait à la bourgade des Agniers.

Blessé pendant le massacre, Tête d’Aigle, avait laissé le gros de ses guerriers en campagne pour veiller lui-même sur ses prisonniers.

Nous retrouvons Yvonne et son père confinés dans une cabane d’écorce de bouleau à quelque distance du wigwam de Tête d’Aigle. La jeune fille prodigue ses soins au vieillard qu’une fièvre brûlante dévore.

— Hélas ! ma pauvre enfant, murmure le père Kernouët, tu t’épuises en soins inutiles. Ne vaudrait-il pas mieux m’abandonner à mon triste sort ?

— Parlez-vous bien en chrétien, mon père ? réplique la jeune fille. Que deviendrais-je si le bon Dieu vous enlevait à ma tendresse ?

  1. Raynal — Charleboix : journal historique d’un voyage en Amérique. — Colden.