Page:Roussel - Impressions d Afrique (1910).djvu/123

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Stéphane Alcott, vigoureux gaillard au thorax proéminent, sortit de nos rangs avec ses six fils, jeunes gens de quinze à vingt-cinq ans, dont la maigreur fabuleuse transparaissait de façon impressionnante sous de simples maillots rouges très collants.

Le père, vêtu comme eux, se planta debout en un point quelconque, le dos tourné au couchant, puis, effectuant avec soin un demi-quart de tour vers la droite, s’immobilisa tout à coup, en affectant la rigidité d’une statue.

Partant de l’endroit précis occupé par Stéphane, l’aîné des six frères marcha obliquement dans la direction du Béhuliphruen, frayant exactement la ligne tracée par le rayon visuel de son père et comptant à voix haute ses pas lents et immenses, auxquels il s’appliquait à donner une mesure rigoureusement invariable. Il s’arrêta au chiffre cent dix-sept, et, se retournant face à l’occident, suivit l’exemple paternel en prenant une pose étudiée. Son frère puîné, qui l’avait accompagné, fit vers le sud-ouest une promenade du même genre, et, après soixante-douze pas mécaniquement pareils, se figea ainsi qu’un mannequin, la poitrine exposée au levant. À tour de rôle, les quatre plus jeunes exécutèrent la même manœuvre, choisissant chaque fois pour point de départ le but conventionnel atteint par le dernier mensurateur et apportant dans