Page:Roussel - La Doublure, 1897.djvu/170

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Puis dans ses bras le berce un instant pour qu’il dorme ;
Il a, très en avant, une bouche difforme
Faisant deux bourrelets d’un rouge vif, lippus,
Montrant de grandes dents, et les cheveux crépus
Avec, pris dans le nez, un anneau d’or immense ;
La femme en le tenant d’une main recommence,
Sur tout son corps, en long, en large, à le frotter
Vite, de son plumeau, semblant vouloir ôter
Avec entêtement et désespoir la couche
Noire dont il est fait tout entier, sauf la bouche.
Un écriteau sur son corsage est en hauteur ;
On y lit : « Le nouveau-né dénonciateur »
Entrecoupé sur cinq lignes, serrant ses lettres
D’imprimerie, en long de plusieurs centimètres.
Quand elle est assez près pour qu’il lise, César
Dit que c’est très bien fait à son humble avis, car
Lorsqu’on avait connu d’un peu trop près un nègre,
Il fallait s’arranger après pour rester maigre ;
Que son air repentant ne saurait amoindrir
Sa faute, et ne pourra jamais, lui, l’attendrir,