Page:Roussel - La Doublure, 1897.djvu/180

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Et qu’il va le donner à ce brave homme ; il fouille
Ses habits en ouvrant un peu son domino ;
Mais il ôte sa main, se traitant d’étourneau,
Disant que ce serait vraiment bien inutile
De vouloir s’occuper d’un sujet si futile,
Du moment qu’il est si sûr et certain qu’il doit
Mourir ; que pas un ongle, à présent, d’un seul doigt,
N’aurait le temps de croître assez pour qu’il le lime.
Il parle de l’état d’âme grand et sublime
De l’homme pur qui sait qu’il va bientôt mourir
Et monter au ciel, puis se met à discourir
Sur l’immortalité, l’existence future,
La résurrection de chaque créature
Au jugement dernier… Soudain il s’interrompt
Pour éternuer fort en se tenant le front ;
Il dit : « Ah ! là, mon Dieu ! mon Dieu ! » puis il renifle
En faisant des efforts, prétendant que ça siffle
Et disant : « N’est-ce pas ? » quoiqu’on n’entende rien
Du tout, pour faire voir à Roberte combien
Déjà, malgré le temps si doux, son nez s’obstrue.