Page:Roussel - La Doublure, 1897.djvu/203

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Et titubant, marchant à droite dans la foule,
Le pochard au chapeau haut de forme se soûle
Toujours ; des confettis bougent dans les rebords
Du chapeau ; sous sa tête immobile, son corps,
Au contraire, dans tous les sens tourne et chancelle ;
Il vient de mettre son cruchon sous son aisselle,
Il se frotte le ventre en des airs satisfaits,
Sans cesser de marcher de travers ; ses effets
De soirée ont partout de fortes taches blanches
De confettis, bien plus qu’avant, surtout aux manches.
Il marche pas mal vite, en somme ; à chaque instant
Il se tourne de tous côtés d’un air content,
Comme s’il désirait que tout le monde voie
Sa face épanouie et respirant la joie,
Avec sa bouche ouverte et son regard très gai ;
L’écriteau de son dos a sur deux lignes : « J’ai
Dîné dans le grand monde ». À présent il empoigne
Au milieu, de nouveau, son cruchon et s’éloigne
En dépassant Gaspard et Roberte qui vont
Toujours à gauche dans l’encombrement que font