Page:Roussel - Locus Solus, 1914.djvu/146

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

instruments de musique et statuettes entassés dans le captivant musée.

Soudain il s’arrêta, tremblant de surprise et d’émotion. Devant lui, en pleine lumière blafarde, se dressait, parmi divers bibelots, un sistre à cinq tiges ! Il le saisit hâtivement pour l’examiner de près et, discernant sur le manche le nom de Missir gravé en caractères authentiques, fut certain d’avoir dans la main le fameux sistre impair qui avait soulevé tant de discussions.

Ébloui par sa trouvaille, Gilbert, en échafaudant plusieurs meubles, put se faire un chemin jusqu’à l’orifice créé par lui.

Foulant de nouveau le sol de la place, il regagna l’endroit où sa rêverie s’était prolongée si tardivement et là, ivre de joie, déclama de mémoire, dans leur langue originale, les plus beaux vers de Missir, en agitant doucement le sistre manié jadis par le grand poète.

Sous l’intense clair de lune, Gilbert, exalté, croyait sentir le souffle de Missir revivre en sa poitrine. Il occupait l’emplacement exact où son dieu, au temps passé, récitait mélodieusement à la foule ses strophes nouvelles, scandées par