Page:Roussel - Locus Solus, 1914.djvu/258

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d’une secrète joie en s’affermissant de plus en plus dans son esprit, enivré par le pressentiment d’une prodigieuse trouvaille.

Pour éprouver la justesse de sa théorie, il emplit d’eau un récipient — et posa transversalement sur deux petits fétus de paille parallèles, flottant à la surface, une longue aiguille aimantée, dès lors pourvue d’une parfaite liberté d’évolutions.

Et Roland, ébloui par la grandeur de sa découverte, dont il entrevoyait les sublimes conséquences maritimes, put constater, le cœur palpitant, que l’aiguille, déplacée en n’importe quel sens, ramenait toujours, pour l’y maintenir fixement, sa pointe vers le nord.

Il porta au roi Louis VII son invention gigantesque, apte à faire réaliser tant de progrès à la navigation, à sauver des flots tant de vies humaines, à conduire au relèvement de tant d’étonnantes terres encore inconnues. Enthousiasmé, le souverain, en récompense, lui donna une fortune.

On eut dès lors, à bord de chaque navire, une aiguille aimantée qui montrait le nord, soutenue par deux fétus de paille sur l’eau d’une fiole à