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Le Cancer, fléau social
Conférence faite le 24 février 1921 par M. le Docteur Gustave ROUSSY,
Professeur agrégé à la Faculté de médecine de Paris.


Lorsque mon ami Marcel Labbé m’a demandé de prendre la parole devant vous, je n’ai pas hésité à répondre affirmativement.

En effet, le sujet qu’il me demandait de traiter ici est un des plus vastes à la fois et des plus captivants qui s’offrent à nous, un de ceux qui, malgré les recherches qu’il a suscitées, se refuse encore à nous livrer le secret de son essence intime. Aussi, du point de vue médical, laisse-t-il libre cours aux hypothèses les plus vastes, les plus hardies souvent.

De plus, dans les milieux extra-médicaux, dans le grand public, l’imprécision des données scientifiques a perpétué certaines légendes, qui — comme il est de règle lorsqu’il s’agit du domaine du mystérieux — se sont maintenues debout, se riant de toute logique, de toute critique, de toute observation de contrôle.

À qui la faute ? — Au monde extra-médical, à ce grand public qui, par une tendance naturelle de l’esprit humain, est toujours enclin à accorder foi aux notions qui de transmettent de bouche en bouche et qui, trop souvent viennent imprégner notre cerveau au cours de l’enfance.

Mais c’est aussi à nous médecins qu’incombe, en grande partie, la responsabilité de tels errements ; à nous, qui, accaparés par nos recherches de laboratoire, nos investigations hospitalières, négligeons trop souvent d’entrer en contact avec le public éclairé qui ne demande qu’à savoir et qu’à comprendre. Toutefois, il est juste de remarquer qu’en France, dans ces dernière années, s’est opéré un grand changement dans ce sens, à propos de la Lutte antituberculeuse et de la Lutte antisyphilitique.

Jusqu’ici, en ce qui concerne le Cancer, nous sommes restés très en arrière, alors que, dans les grands pays qui nous encourent, de sérieux efforts sont faits depuis plus de dix ans. Ainsi que je le rappelais tout à l’heure, ce n’est guère qu’aujourd’hui — je veux dire depuis la guerre — que l’on s’est suffisamment ému, dans ce pays, du péril cancéreux et que l’on est enfin arrivé à quelques résultats concrets : résultats minimes encore, mais qui permettent de fonder, sur la campagne organisée contre le cancer, de sérieux espoirs.

J’en veux pour preuve la place importante donnée, ici même, au Cancer dans la série des conférences organisées par l’U. F. F., puisque, jeudi dernier, mon collègue et ami, le docteur Schwartz, a été invité à vous parler du même sujet que celui que nous traitons aujourd’hui.

L’U. F. F. a compris l’intérêt qu’il y avait, à l’heure actuelle ; à créer un mouvement autour de la question du cancer, à parler de cette maladie en dehors des milieux strictement médicaux ; aussi, les organisatrices du service d’enseignement de le propagande de votre Société, Mesdames, ont-elles droit à toutes nos félicitations.

À nous, Médecins, de répondre à cet appel en essayant de vous montrer tout l’intérêt que comporte la campagne contre le cancer, campagne désormais ouverte et dans laquelle les infirmières de la Croix-Rouge pour-