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pelune, assiégée par Jean d’Albret. Très gravement blessé à la jambe, et devenu incapable de poursuivre sa carrière de soldat, il avait conçu le projet d’établir une autre milice qui combattrait les ennemis de l’Église par la parole, et qui répandrait au loin la vérité. L’ancienne chevalerie avait fait son temps. L’heure était venue d’armer des chevaliers spirituels pour lutter contre les nouvelles doctrines que la réforme propagerait dans le monde.

C’est dans l’Église de Mont-Serrat que le nouveau chevalier vint faire sa veillée des armes. Il se nommait Inigo de Loyola, et, quelques années après, il jetait à Paris les bases de cette puissante association qui s’est appelée la Société de Jésus.

Enfin nous arrivons à Saragosse, paresseusement couchée aux bords de l’Ebre, qui murmure bruyamment sans pouvoir la réveiller.

C’est là que se révélait à nos yeux le cachet national de la vieille Espagne. C’est là que nous retrouvions, écrits dans la pierre, les souvenirs culminants de son passé, le Moyen-Âge et ses légendes, la domination arabe et son architecture étrange et gracieuse.

Nous visitions Notre-Dame-del-Pilar, basilique immense sans grande beauté, mais célèbre par la tradition qui lui a donné ce nom ; la Séo, cathédrale remarquable par la grandeur et l’élégance de ses nefs ; l’Aljaféria, ancien palais des rois d’Aragon, et tribunal de l’Inquisition.

Mais pourquoi m’attarder à vous décrire ce rêve qui ne s’est pas réalisé ? En sacrifiant les jouissances que