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une église, et, quant au chœur, l’art gothique, sur les confins de la Renaissance, n’a rien produit de plus pur, de plus parfait, ni de mieux dessiné.

Une des portes latérales conduit au cloître, dont le promenoir à arcades entoure un jardin oriental, et dont les murs sont couverts de grandes fresques. Nous le parcourons rapidement, et nous revenons à l’église dont nous avons peine à nous arracher.

En sortant de la cathédrale, nous entrons dans un dédale de ruelles tortueuses dont vous ne sauriez vous faire une idée. C’est à se demander parfois si l’on circule dans une ville, ou dans des catacombes. Car les maisons très hautes se rejoignent presque au-dessus de notre tête, et la ruelle se change, tantôt en escaliers qui paraissent conduire sous terre, et tantôt en spirales qui ramènent au jour. Ici, c’est la ville mauresque avec ses maisons sans fenêtres et ses portes basses à arcades, là c’est la ville du Moyen-Âge, avec ses fossés, ses créneaux, ses écussons et ses légendes.

Enfin, nous arrivons en pleine lumière devant une église gothique et un cloître : c’est San Juan de los Reys. Aux murs extérieurs sont suspendues de longues chaînes de fer que portaient les prisonniers chrétiens délivrés par la prise de Grenade, en 1492. Les tribunes de l’église, les piliers, les arceaux et les voûtes présentent un admirable coup-d’œil. Mais le cloître est infiniment plus beau. C’est un joyau d’architecture et de sculpture à mettre dans un écrin. Aucune expression ne peut exagérer la beauté de ce monument qu’un écrivain proclame majestueux comme un temple, magni-