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L’ANGLETERRE

La politique de l’Angleterre depuis la guerre de Crimée relativement aux autres puissances a été la non-intervention et pourrait bien tourner contre elle. On dira que cette conduite ne lui a pas fait d’ennemis ; c’est possible, mais lui a-t-elle fait des alliés ? Moins encore. Elle aura toujours pour ennemis les peuples dont les intérêts viendront en en conflit avec les siens, et s’il faut lutter alors contre une puissance plus forte qu’elle, qui viendra à son secours ?

Le laisser-faire donne la paix du moment ; mais il n’assure pas l’avenir, et ne sauve pas toujours l’honneur. En Amérique, l’Angleterre a laissé chasser la France du Mexique, et écraser les États du Sud par les États du Nord ; en Europe, elle a laissé battre l’Autriche et démembrer la France.

C’étaient pourtant ses alliés naturels dans la question d’Orient, et quand cette éternelle question surgira de nouveau, elle sera forcée de défendre seule ses intérêts. Alors son immense empire colonial ne sera guère facile à protéger, et ses forces trop divisées seront insuffisantes à repousser les envahisseurs.

D’ailleurs les vastes colonies britanniques grandissent et se développent rapidement, et dans un avenir plus ou moins éloigné, l’Australie et le Canada se détacheront de l’Angleterre sans secousse, comme les fruits tombent de l’arbre lorsqu’ils sont mûrs.

La civilisation européenne qui pénètre dans les Indes produira le même effet sur les riches possessions anglaises de ce pays, et un jour les innombra-