Page:Routhier - À travers l'Europe, impressions et paysages, Vol 1, 1881.djvu/42

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

leur esclavage. Ils s’en vengèrent sur la statue qui pendant plus d’un siècle fut l’objet de toutes sortes d’avanies, et la cause de beaucoup d’émeutes et de troubles.

Les élèves du Trinity College, en véritables universitaires, en voulurent aussi à la statue parce qu’elle leur tournait le dos. Il y avait de quoi : une statue équestre vue par derrière, c’est peu gracieux !

Les orangistes, de leur côté, tenaient la statue en grande vénération, et dans leurs fêtes ils la faisaient décorer et peindre pompeusement.

Pat n’en était que plus vexé, et le lendemain d’une fête ou peu après on trouvait la figure de Guillaume III horriblement tatouée ou couverte d’ordure, ou son épée tordue, ou son bâton de commandement arraché, ou victime de quelqu’autre indignité.

Les Orangistes criaient au sacrilège, et faisaient laver et réparer leur héros. Ils y mirent un gardien ; mais Pat se moquait du gardien et consommait toujours son mauvais coup.

Un jour, la fête des orangistes tombant un dimanche devait être célébrée le lundi. Le samedi, à minuit, un jeune homme se présente au gardien, et lui dit qu’il est envoyé par le peintre décorateur de la cité afin d’orner la statue pour la fête, et qu’il a choisi cette heure par crainte de violence. Le gardien lui donna libre accès au monument, et quand le jour parut on trouva le Roi Guillaume entièrement couvert d’une couche épaisse de goudron et de saindoux, et ce pauvre Billy, comme l’appelaient les Irlandais, por-