Page:Routhier - De Québec à Victoria, 1893.djvu/168

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En attendant que le flot des migrations humaines ait inondé ces plaines immenses, la solitude qui nous environne n’est pas sans tristesse. Je ne sais quoi de mélancolique se mêle à cet air que nous respirons, et le désert sans bornes nous apparaît comme une énigme dont nous cherchons vainement la solution.

Depuis combien de siècles existe-t-il ? D’où venaient ces races étranges qui l’ont habité, ou plutôt sillonné, sans le remplir, ni le féconder ? Pourquoi n’y ont-elles rien fondé, et vont-elles maintenant disparaître sans y laisser la moindre trace ?

Comment se fait-il qu’elles n’y aient pas créé des groupes stables, bâti des villes, érigé des monuments, ne fut-ce qu’une tour de Babel, pour symboliser les langues si diverses et si nombreuses qu’elles parlent.

Tous ces problèmes et bien d’autres se posent devant nous comme les questions du sphynx, et la prairie que nous interrogeons ne nous répond rien.

Quand le voyageur traverse les solitudes de l’Orient, elles lui montrent des ruines, des pierres, des tombeaux, des inscriptions qui font revivre sous ses yeux les siècles écoulés. Mais ici rien n’est resté, pas même une tombe qui contienne les cendres du passé, et nous permette de refaire son histoire.

Sur ce vaste théâtre où des races nombreuses se sont succédées, et ont dû jouer un rôle, elles ont laissé moins de vestiges de leur passage que les grands troupeaux de