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Page:Routhier - De Québec à Victoria, 1893.djvu/308

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Quelques sanglots étouffés rompirent seuls le silence qui suivit ; des larmes jaillirent de bien des yeux, et les psalmodies plaintives recommencèrent.

Peu à peu cependant les prières se turent, et les personnages du drame se dispersèrent. La foule silencieuse et recueillie s’écoula. Le soleil se voila d’épais nuages, et une pluie tranquille et chaude recommença à tomber. C’était le ciel mêlant ses larmes à celles de la terre.

Je m’approchai du crucifix solitaire. Les planches de l’estrade où il était fixé étaient toutes rougies et le sang du Christ coulait toujours.

Ô sang de mon Sauveur, c’est ainsi que tu couleras sur la terre jusqu’à la fin des temps, afin de laver les péchés sans cesse renouvelés de notre triste humanité !

Ah ! qu’ils étaient loin de soupçonner cette merveille les bourreaux qui ont crucifié Jésus ! Quel sens profond se cachait dans cette parole divine prononcée à leur sujet : « Ils ne savent pas ce qu’ils font : »

Non, ils ne savaient pas que ce sang qu’ils versaient était une fontaine de vie dans laquelle l’humanité était régénérée ! Ils ne savaient pas que ce sang dont ils croyaient avoir épuisé les dernières gouttes en perçant le divin cœur, continuerait d’arroser la terre, et que dans les régions les plus lointaines et dans les solitudes