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STELLA MARIS


I

Il y a, mes enfants, par delà l’Atlantique
Sur les bords où la mer raconte en sanglottant
Ses lugubres secrets à la vieille Armorique,
Une baie arrondie au pied d’un cap géant.
Cette grêve sourit au soleil qui se couche
Et qui fait scintiller ses sables caressés.
Mais elle porte hélas ! un nom triste et farouche :
On l’appelle partout la Baie-des-Trépassés.
Elle est chez les marins trop célèbre en naufrages
Et l’on dit que le sable emprunte sa blancheur
Aux os des naufragés broyés sur ses rivages.
Or sachez qu’autrefois Kervilo, le pêcheur,
Au fond de cette baie habitait une hutte
Avec sa femme Jeanne et leur unique enfant.
Pauvre pêcheur breton ! Sa vie est une lutte
Où la terreur succède à l’espoir triomphant,
Où sont mêlés les jours de soleil et d’orage,