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LE CENTURION

— S’il en est ainsi, c’est moi qui devrais avoir de l’influence sur eux, et non pas eux sur moi.

— Cela peut être réciproque.

— Qu’est-ce qui peut être réciproque ? L’influence ou l’admiration ?

— Les deux.

— Mais en quoi cela vous intéresse-t-il ?

— Ô Camilla, regardez cette mer immense dont l’horizon semble illimité. Nous ne voyons rien au delà ; mais nous savons bien qu’il y a par delà une terre bénie, que nous aimons tous les deux, qui est notre commune patrie, qui a été le berceau de notre enfance, et dont le nom seul réveille en nous de chers souvenirs. Cela suffit pour que rien de ce qui vous concerne ne me soit indifférent.

— Mais pourquoi donc avez-vous tant tardé à me rappeler ce lien de sympathie qui nous rapproche ?

— Dans nos campagnes militaires, il nous arrive quelquefois de rencontrer une ville dont nous croyons les portes ouvertes, tandis qu’elles sont en réalité fermées et défendues. Nous nous tenons alors à distance.

— Mais je croyais qu’alors vous en faisiez le siège ?

— Oui, mais la position d’assiégeant est toujours difficile, et les opérations doivent être conduites avec une sage lenteur. C’était la tactique de notre Fabius.

— Et quelle est la conclusion de ce verbiage ?

— C’est que je me suis conduit à votre égard comme à l’égard d’une ville à prendre, et que je