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Page:Routhier - Le Centurion, roman des temps messianiques, 1909.djvu/26

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LE CENTURION

je me demandais ce qu’il y avait de vrai et surtout ce qu’il y avait de sincère en tout cela. Je n’étais pas assez naïf pour tout croire, et j’admirais trop la belle Myriam pour y renoncer facilement. J’ai donc voulu la revoir, et ça n’a pas été sans peine. Car sa porte est fermée à tout venant. Grâce à la complicité de sa suivante, et en prétextant une affaire importante, j’ai pu avoir encore une entrevue avec elle.

Tout d’abord, je feignis d’ignorer entièrement son histoire, et je lui exprimai mon admiration dans les termes les plus délicats et les plus voilés.

Je lui peignis toute la sincérité de mes sentiments, et j’implorai la grâce d’un sourire et d’une douce parole de celle qui m’avait conquis par ses regards, où se réflète une candeur virginale.

Pendant que je parlais, elle avait tenu les yeux baissés. Quand elle les releva, ils exprimaient une tristesse profonde. Un sourire amer effleura ses lèvres, et elle me dit simplement : « Vous ne connaissez pas celle à qui vous parlez. Si vous la connaissiez, vous éprouveriez d’autres sentiments, et vous tiendriez un autre langage. Si mes regards vous ont trompé, j’en suis vraiment fâchée, et je vous conseille de porter ailleurs un amour dont je ne suis pas digne, s’il est pur, et qui est indigne de vous, s’il ne l’est pas. Toute relation entre nous est impossible, et je vous demande comme faveur de ne plus jamais chercher à me voir.