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LE CENTURION

citer qui attribuent la filiation divine au Messie. Et alors la question est de savoir si Jésus est le Messie ou non.

« On dit encore que le Messie doit être roi, et doit rétablir le royaume de Juda. Mais il me semble à moi plus que douteux que l’évolution religieuse opérée par le Messie doive être en même temps une évolution politique. Qu’il soit appelé à régner sur les âmes, et par là même sur les nations, je le crois. Mais qu’il doive porter l’épée, et rétablir le royaume politique de Juda, j’en doute beaucoup.

« Telle ne paraît pas être non plus l’œuvre que Jésus de Nazareth se propose. Quand les foules ont voulu le proclamer roi, il s’est dérobé, et il déclare à qui veut l’entendre que le royaume qu’il veut fonder n’est pas de ce monde. Donc c’est le royaume des âmes.

« Dès lors je ne vois pas comment son œuvre pourrait porter ombrage à Rome.

« Au reste, nous ne sommes pas chargés des intérêts de Rome. Laissons au procurator le souci et le soin d’y veiller.

« Je conclus que notre attitude à l’égard de Jésus de Nazareth doit être d’expectative, d’observation et d’étude. Ajoutez-y de la défiance, si vous le voulez. Continuez l’espionnage que vous avez organisé contre lui, je n’y objecte pas.

« Engagez même la lutte avec lui sur le terrain théologique, dogmatique et moral, si le cœur vous en dit, je la suivrai avec un vif intérêt. Plusieurs