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LE CENTURION

Dans cette vallée de Josaphat qui s’étendait sous ses yeux, que nul ne labourait jamais que pour y ensevelir ses morts, sa lumière allait pénétrer au sein des semailles humaines, et leur infiltrer une vie nouvelle.

Du séjour des morts, ses rayons allaient jaillir jusqu’aux confins des horizons célestes, et donner enfin la vision de Dieu aux Justes détenus dans la prison mystérieuse des Limbes.

Ce glorieux lendemain des jours ténébreux, ce triomphe prochain du grand vaincu, c’était déjà le présent pour le regard de Jésus, et il pouvait vraiment se dire : « Ce n’est pas moi qui vais mourir, c’est le monde antique, c’est Jérusalem, la patrie de mes pères, c’est Rome, la grande prostituée qui pervertit les nations.

« Là-bas, sur les bords du Tibre, je vois déjà se dresser un trône pour mon apôtre Pierre, devenu roi immortel. Et sur la plus haute colline de la grande cité où fleurissait le culte de Junon, fausse mère des faux dieux, je vois s’élever un temple somptueux en l’honneur de ma vénérée mère, la mère du vrai Dieu.

« Partout, sur toutes les plages, au milieu des ruines amoncelées des plus puissants empires, et jusque dans les déserts, je vois germer la semence que j’ai jetée en terre, et s’épanouir de merveilleuses floraisons.

« Partout, je vois s’élever d’innombrables autels consacrés à mon culte, et grandir une civilisation