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LE CENTURION

— Il n’est pas fini, Camilla. La divinité ne peut pas mourir ; et c’est lorsque son œuvre paraît vaincue qu’elle a besoin de défenseurs.

— Vous êtes un noble cœur, Caïus, et j’admire votre courage ; mais, au nom de notre amour, réfléchissez encore, et dans l’entraînement d’aujourd’hui ne perdez pas de vue demain…

Si vous ne craignez pas de briser mon cœur, craignez de briser votre carrière, et de rompre tant d’autres liens qui vous sont chers. Songez à votre famille dont vous êtes l’honneur et l’espoir, à vos amis de Rome, à votre patrie elle-même qui a des droits sur vous.

— J’ai songé à tout ; et je suis au désespoir de penser que la première immolation que ma foi m’impose est mon amour pour vous. Non seulement votre père ne consentira jamais à votre union avec un disciple du Crucifié ; mais je m’y refuserais moi-même s’il y consentait. Il répugnerait à ma conscience d’associer ma vie à celle d’une femme qui ne partagerait pas mes croyances.

Adieu, Camilla.

— Ô Caïus ! vous déchirez mon cœur.

— Je comprends votre douleur, et je souffre plus que vous peut-être. Je vous aime de toutes les forces de mon âme ; mais je crois en Jésus de Nazareth ; il est mon Dieu, et ma vie lui appartient désormais. Un jour peut-être vous comprendrez que la foi est plus forte que l’amour, ou que l’amour est sans droit contre la foi.